ABDEL OBTIENT L’ASILE – communiqué du 20 janvier 2019

Depuis la commune de Faux-la-Montagne et depuis la Montagne limousine

ABDEL OBTIENT L’ASILE

Le 21 septembre dernier, la préfecture de la Creuse tentait une nouvelle fois d’expulser (« transférer » dans le langage administratif qui s’impose pour masquer la violence des situations ainsi créées) Abdel, jeune Soudanais vivant à Faux-la-Montagne depuis presque un an.

Malgré la mobilisation de nombreux habitants encore une fois obligés de descendre dans la rue pour défendre les valeurs fondamentales de fraternité et de solidarité sans cesse bafouées par la politique migratoire du Gouvernement appliquée avec une particulière dureté et même cruauté par la préfecture de la Creuse, Abdel était ce jour-là embarqué pour le centre de rétention de Palaiseau, après gazage des citoyens rassemblés autour de la gendarmerie.

Occupant la mairie de Guéret, les soutiens d’Abdel parvenaient enfin, après d’interminables négociations, à arracher un rendez-vous avec Olivier Maurel, secrétaire général de la préfecture. Cette rencontre s’est avérée inutile puisqu’il était hors de question pour ce dernier d’entrer dans une quelconque discussion avec les membres de la délégation.

Devant leur obstination à ne pas quitter les lieux sans avoir obtenu une réponse positive à leur demande, il finissait par les faire expulser manu militari et avec l’aide de chiens policiers.

Cette demande était pourtant simple : permettre à un jeune exilé soudanais, ayant fui un régime génocidaire, ses geôles et ses tortures, de pouvoir enfin demander l’asile en France, pays où il avait créé des liens et commencé une nouvelle vie, soutenu par une population accueillante.

Cet accès à la procédure d’asile, la préfète et le secrétaire général de la préfecture avaient le pouvoir de le lui donner. Mais, malgré les demandes réitérées depuis plusieurs mois en particulier par le conseil municipal de Faux-la-Montagne et son maire, l’application de la « loi » était sans cesse invoquée pour le refuser à Abdel. Pourtant, cette « loi » donne tout pouvoir aux autorités françaises pour examiner toutes les demandes d’asile qui lui sont faites. La préfecture, au soir du transfert en centre de rétention, se sentait même dans l’obligation de se fendre d’un communiqué de presse comminatoire, indiquant qu’il n’y avait « aucune raison de dispenser ce ressortissant soudanais » de sa « réadmission vers l’Italie » « seule compétente désormais » et qu’un retour sur le territoire après transfert constituait désormais « un délit puni de trois ans d’emprisonnement ».

Au lieu de cela, deux semaines plus tard, le 3 octobre, le Tribunal Administratif de Limoges jugeait que « le refus d’enregistrer la demande » constituait « une atteinte grave et manifestement illégale » au droit d’Abdel « constitutionnellement garanti de solliciter le statut de réfugié » et enjoignait à la préfète « d’enregistrer la demande d’asile […] dans un délai de huit jours ».

Reçu en préfecture de la Creuse le 11 octobre pour se voir remettre le dossier de demande d’asile, Abdel déposait ce dossier complet le 30 octobre à l’OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et des Apatrides) où il était reçu en entretien le 5 décembre.

Suite à cette procédure, Abdel vient de recevoir la décision du Directeur général de l’OFPRA lui reconnaissant la qualité de réfugié, le plaçant sous la protection juridique et administrative de l’Office et lui donnant accès à un titre de séjour de 10 ans et à l’autorisation de travailler.

Abdel va ainsi pouvoir suivre la formation de charpentier qu’il souhaite et tenter d’obtenir le CAP lui permettant d’accéder à un métier qualifié.

Il va aussi pouvoir mener une vie moins faite d’angoisses.

Mais cela, il aurait pu en bénéficier dès le mois de mars 2018 si l’administration préfectorale ne s’était pas entêtée dans ses décisions illégales et inhumaines. Ainsi, pendant presque une année supplémentaire, il a vécu dans l’angoisse permanente, sans pouvoir ni se former, ni travailler pour assurer dignement sa subsistance. Pendant cette année, à l’instar de beaucoup d’autres, il se serait retrouvé à la rue sans la solidarité des habitants de Faux-la-Montagne et alentours. Enfin, il a subi l’intense traumatisme d’un emprisonnement en centre de rétention.

Nous estimons que cette opération illégale a coûté au bas mot 55 000 € au contribuable, sans même prendre en considération le temps consacré par les habitants mobilisés à lutter contre des mesures iniques. Du temps qui aurait été tellement mieux employé à développer le réseau social d’Abdel et des personnes dans la même situation que lui. De l’argent qui, pour un coût bien moindre, aurait permis de financer des cours de français, des formations qualifiantes et tout le soutien nécessaire à des jeunes isolés avant qu’ils puissent trouver leur autonomie.

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